Au-delà du thriller : une plongée dans la psyché humaine
Jeanne Espalioux signe avec Inconscience un roman qui déjoue les attentes du genre. Là où le thriller classique mise sur l’action et le suspense extérieur, l’auteure choisit de plonger ses lecteurs dans les méandres de la psyché humaine confrontée au drame. La disparition de Nélia au Parc Floral n’est pas qu’un simple point de départ narratif : elle devient le catalyseur d’une exploration profonde des tourments intérieurs, des non-dits familiaux et des mécanismes de culpabilité qui rongent une famille ordinaire basculant dans l’extraordinaire.
Le pari d’Espalioux réside dans cette tension permanente entre l’enquête policière traditionnelle et l’investigation psychologique. Plutôt que de multiplier les rebondissements spectaculaires, elle construit son récit sur l’effondrement progressif d’Angèle, cette mère qui doit affronter simultanément la culpabilité d’avoir détourné le regard, l’angoisse de ne jamais retrouver son enfant, et le cancer qui frappe sa propre mère. Cette architecture narrative transforme le thriller en une chambre d’échos où résonnent les fragilités de chacun.
La force du roman tient à son ancrage dans le quotidien. Les scènes au commissariat alternent avec des consultations chez la psychologue, les recherches frénétiques de Cédrick côtoient les silences pesants entre mère et fille. Espalioux ne cherche pas à spectaculariser la tragédie : elle la laisse infuser dans les détails du réel, dans ces moments où l’on regarde son portable au parc, où l’on prépare un repas tout en portant le poids d’un secret, où l’on tente de maintenir une apparence de normalité alors que tout s’effondre. Cette approche confère au récit une dimension universelle qui dépasse largement le cadre du thriller conventionnel.
L’auteure parvient ainsi à créer un espace littéraire singulier où le suspense naît moins de l’identification du ravisseur que de la question lancinante : comment survivre à l’insoutenable ? En choisissant l’intimité comme terrain d’exploration, Espalioux propose une réflexion sur la nature même de la conscience et de ses failles, transformant son roman en une expérience de lecture qui interroge autant qu’elle captive.
Le livre de Jeanne Espalioux à découvrir
La culpabilité comme moteur narratif
Au cœur d’Inconscience, la culpabilité se déploie comme une force centrifuge qui propulse l’intrigue tout en fragmentant les personnages. Angèle incarne cette déchirure : quelques minutes d’inattention, un regard porté sur un écran plutôt que sur sa fille, et c’est toute une existence qui bascule. Espalioux ne se contente pas de poser ce sentiment comme décor psychologique, elle en fait le véritable carburant du récit. Chaque chapitre porte la trace de cette faute initiale, chaque action des personnages s’inscrit dans sa résonance. La romancière explore ainsi comment un simple moment d’inconscience peut dévorer une vie entière, tel un virus qui contaminerait progressivement tous les aspects de l’existence.
Ce qui frappe dans le traitement de cette thématique, c’est la multiplication des niveaux de culpabilité qui s’entrecroisent. Clara se reproche son absence au parc ce jour-là, mais aussi des décennies de distance émotionnelle avec sa fille. Cédrick porte le poids de sa violence incontrôlable face au ravisseur. Même les personnages secondaires semblent pris dans cette toile de responsabilités enchevêtrées. L’auteure construit ainsi un système de culpabilités en miroir où chacun se demande quelle part il a prise dans la catastrophe, créant une polyphonie de remords et de regrets qui enrichit considérablement la texture narrative.
Espalioux évite néanmoins l’écueil du pathos en refusant de complaire dans la victimisation de ses personnages. Les séances de psychothérapie d’Angèle, loin d’être de simples passages explicatifs, deviennent des espaces où s’élabore une réflexion nuancée sur la notion de responsabilité. La distinction entre culpabilité et responsabilité, entre ce qui relève du contrôle individuel et ce qui appartient au hasard tragique, traverse tout le roman sans jamais être résolue de façon simpliste. Cette ambiguïté maintenue confère au récit une profondeur qui résiste aux interprétations univoques.
L’originalité du propos réside également dans la façon dont la culpabilité devient paradoxalement un lien. Elle rapproche Angèle et Clara, elle soude le couple malgré l’incarcération, elle transforme les relations familiales. En faisant de ce sentiment dévastateur non seulement un obstacle mais aussi un vecteur de connexion humaine, Espalioux démontre une compréhension fine des mécanismes psychologiques et propose une vision complexe de la reconstruction après le traumatisme.
Les relations mère-fille au cœur du récit
Inconscience tisse sa trame narrative autour d’une triple relation mère-fille qui structure l’ensemble du roman. Entre Clara et Angèle se joue un dialogue inachevé, fait de silences pesants et de non-dits accumulés sur trois décennies. Entre Angèle et Nélia se dessine un amour fusionnel brutalement interrompu par la disparition. Ces deux axes relationnels se répondent et s’éclairent mutuellement, créant une réflexion en profondeur sur la transmission, l’attachement et les différentes manières d’aimer. Espalioux prend le temps d’explorer ces dynamiques complexes sans chercher à les résoudre artificiellement, acceptant que certaines blessures ne se referment jamais complètement.
Le portrait de Clara s’impose comme l’un des éléments les plus travaillés du roman. Cette psychiatre incapable d’établir une connexion émotionnelle avec sa propre fille, cette femme qui compense par l’organisation et le contrôle ce qu’elle ne parvient pas à offrir en présence affective, échappe aux stéréotypes de la mauvaise mère. L’auteure dépeint avec justesse cette forme particulière d’amour parental qui ne sait pas se dire, qui s’exprime par des actes concrets plutôt que par des mots ou des gestes tendres. La transformation progressive de Clara face à la maladie et au drame familial dessine une trajectoire crédible, où le changement n’efface pas les années de distance mais ouvre néanmoins un espace de réconciliation possible.
La relation entre Angèle et Nélia fonctionne en contrepoint. Là où Clara maintient la distance, Angèle cherche la proximité. Là où la grand-mère a surinvesti le cadre éducatif au détriment de la spontanéité, la mère privilégie l’écoute et la présence. Cette opposition n’est jamais caricaturale : Espalioux montre comment Angèle reproduit parfois malgré elle certains schémas maternels, comment les blessures d’une génération informent les choix de la suivante. Le moment où Nélia dessine sa famille pendant sa captivité révèle avec une économie de moyens remarquable la force de ces liens filiaux qui transcendent même le traumatisme.
Ce qui confère sa richesse à cette thématique, c’est le refus de toute résolution sentimentale facile. Les derniers échanges entre Clara et Angèle, teintés de la conscience de la mort imminente, n’effacent pas miraculeusement les années de frustration. La lettre posthume de Clara à sa fille exprime un amour réel sans pour autant nier les manquements passés. En choisissant cette honnêteté narrative, Espalioux offre une représentation des relations filiales qui résonne avec authenticité, loin des réconciliations hollywoodiennes qui aplanissent artificiellement les aspérités du réel.
Les meilleurs polars à dévorer chez amazon
Le portrait de personnages aux multiples facettes
Jeanne Espalioux construit ses personnages par strates successives, révélant progressivement leurs contradictions et leurs zones d’ombre. Cédrick incarne cette complexité narrative : responsable de la sécurité dans son métier, protecteur instinctif de sa famille, il devient paradoxalement celui qui met en péril leur avenir par un acte de violence incontrôlée. L’auteure ne cherche ni à l’excuser ni à le condamner, préférant documenter minutieusement la montée de sa rage, ses nuits d’errance, sa transformation progressive en « loup » prêt à tout pour retrouver sa fille. Cette approche permet d’appréhender le personnage dans toute son humanité troublante, loin des archétypes du père vengeur ou du criminel repenti.
La galerie de seconds rôles témoigne également d’un travail d’écriture attentif aux nuances. Maximilian Fabre, le ravisseur érotomane, aurait pu n’être qu’un simple faire-valoir maléfique. Espalioux lui accorde au contraire une psychologie élaborée, explorant son délire avec une précision clinique qui rend le personnage à la fois effrayant et pathétique. Ses journaux intimes révèlent un homme détruit par le rejet familial, prisonnier d’une construction fantasmatique où Clara devient l’objet d’une passion délirante. Sans jamais verser dans la complaisance, l’auteure montre comment la folie peut transformer un acte monstrueux en logique tordue aux yeux de celui qui le commet.
La psychologue d’Angèle fonctionne comme un personnage-miroir particulièrement réussi. Ses réflexions intérieures, ses doutes professionnels, sa propre remise en question face au drame que vit sa patiente ajoutent une dimension méta-narrative intéressante. À travers elle, Espalioux interroge les limites de l’accompagnement thérapeutique, la porosité entre distance professionnelle et implication humaine. Ces passages en focalisation interne sur la thérapeute auraient pu alourdir le récit ; ils créent au contraire un espace de respiration et de recul qui enrichit la compréhension des mécanismes psychologiques à l’œuvre.
Même les personnages les plus brièvement esquissés portent une épaisseur certaine. Ludovic Deuil, le directeur des ressources humaines manipulateur, Liya la belle-mère chaleureuse, ou encore les différentes patientes de Clara dessinent un monde cohérent où chacun porte ses blessures et ses stratégies de survie. Cette attention portée à l’ensemble du spectre des personnages, plutôt qu’aux seuls protagonistes, confère au roman une densité sociologique qui dépasse le cadre strict du thriller familial pour embrasser une réflexion plus large sur les fragilités contemporaines.
Une construction narrative au service de l’émotion
Espalioux orchestre son récit selon une architecture temporelle qui amplifie la tension dramatique. Le décompte obsédant des jours suivant la disparition (J+1, J+2, J+3…) transforme chaque chapitre en une nouvelle étape de la descente aux enfers familiale. Cette structure calendaire crée un effet de compression temporelle où chaque journée pèse son poids d’angoisse, où le temps qui s’écoule devient l’ennemi silencieux qui réduit les chances de retrouver Nélia vivante. L’auteure joue habilement avec ce compte à rebours implicite, alternant les moments de frénésie et les plages de prostration qui traduisent l’épuisement physique et mental des protagonistes.
La polyphonie narrative constitue l’autre choix structurel majeur du roman. En multipliant les points de vue – Angèle, Clara, Cédrick, la psychologue, et même brièvement Maximilian – Espalioux tisse une mosaïque de perspectives qui enrichit considérablement la compréhension des événements. Les séances de psychothérapie fonctionnent comme des sas de décompression narrative où le lecteur accède aux coulisses de l’accompagnement thérapeutique, tandis que les lettres et journaux intimes offrent un accès direct à l’intériorité des personnages. Cette variété des modes narratifs aurait pu fragmenter le récit ; elle crée au contraire une forme de respiration qui tempère l’intensité émotionnelle sans jamais la diluer.
L’insertion de flashbacks pour éclairer le passé d’Angèle et Clara s’intègre organiquement au présent narratif. Ces retours en arrière ne sont pas de simples pauses explicatives mais participent pleinement de la dynamique émotionnelle du récit. Lorsque le roman revient sur la rencontre entre Cédrick et Angèle au centre commercial, c’est pour mieux faire ressortir par contraste la brutalité de leur séparation actuelle. Quand l’enfance de Clara ressurgit, elle éclaire d’un jour nouveau ses difficultés à exprimer l’affection, transformant ce qui pourrait passer pour de la froideur en traumatisme transgénérationnel.
Certains choix narratifs peuvent néanmoins questionner. La longue séquence finale remontant aux origines de Maximilian et détaillant son passage à l’acte survient tardivement, au moment où le lecteur connaît déjà l’issue de l’enlèvement. Cette construction en rétrospective génère une forme de suspense psychologique plutôt que factuel, déplaçant l’intérêt du « que s’est-il passé ? » vers le « comment en est-on arrivé là ? ». Le pari fonctionne dans l’ensemble, même si l’on peut regretter que cette plongée dans l’esprit du ravisseur arrive à un moment où l’émotion liée au sort de Nélia s’est déjà résorbée.
Les meilleurs polars à dévorer chez amazon
Les thèmes universels de la résilience et du pardon
La résilience traverse Inconscience comme un fil rouge qui refuse la facilité du happy ending. Espalioux dépeint un processus de reconstruction long, chaotique, semé d’avancées et de rechutes. Angèle ne se remet pas miraculeusement de la disparition de sa fille une fois celle-ci retrouvée ; elle doit affronter les cauchemars, l’hypervigilance post-traumatique, la culpabilité qui continue de la ronger malgré le dénouement heureux. Cette approche réaliste de la résilience évite l’écueil du récit édifiant où la force de caractère suffirait à transcender le traumatisme. L’auteure montre au contraire que se reconstruire exige du temps, un accompagnement thérapeutique, et surtout l’acceptation que certaines cicatrices ne disparaissent jamais totalement.
Le pardon s’impose comme une question centrale qui irrigue toutes les relations du roman. Angèle doit-elle se pardonner son moment d’inattention ? Clara peut-elle se pardonner trente ans de distance émotionnelle ? Cédrick mérite-t-il le pardon pour sa violence incontrôlée ? Espalioux refuse les réponses toutes faites et préfère explorer les nuances de cette notion complexe. Le pardon n’apparaît pas comme un événement ponctuel mais comme un cheminement progressif, parfois contradictoire, où l’on avance et recule au gré des émotions. La lettre posthume de Clara à sa fille cristallise cette complexité : elle demande pardon sans s’apitoyer, reconnaît ses manquements sans se flageller, et offre ainsi une forme de réconciliation qui n’efface pas le passé mais en modifie la lecture.
L’utilisation récurrente du dispositif thérapeutique permet à l’auteure d’approfondir ces thématiques sans les didactiser. Les séances entre Angèle et sa psychologue fonctionnent comme des espaces où s’élabore une réflexion sur la responsabilité, la culpabilité et les mécanismes de défense. La distinction subtile entre regret et remords, entre ce qui relève du contrôlable et de l’accident, traverse tout le roman et offre au lecteur des clés de compréhension sans jamais imposer une interprétation univoque. Cette approche confère au récit une dimension quasi-philosophique qui transcende le cadre du thriller psychologique.
La résilience collective de la famille constitue peut-être l’aspect le plus touchant du roman. Malgré l’incarcération de Cédrick, malgré la maladie puis la mort de Clara, malgré le traumatisme de Nélia, la cellule familiale se maintient et se reconstruit selon de nouvelles modalités. Les lettres échangées entre les époux séparés, l’invention par Cédrick du concept de « super-pouvoir de protection » pour rassurer sa fille, ou encore la création d’une bande dessinée thérapeutique témoignent de cette capacité à transformer l’adversité en opportunité de connexion. Espalioux célèbre ainsi la puissance des liens affectifs sans verser dans l’idéalisation, montrant que l’amour familial ne protège pas de la souffrance mais donne les ressources pour la traverser.
L’écriture au service de l’authenticité psychologique
Espalioux déploie une écriture sobre et précise qui privilégie la justesse psychologique à l’effet de style. Son choix de phrases souvent courtes, de paragraphes ciselés, traduit l’état de sidération des personnages face au drame. Lorsque Angèle découvre la disparition de Nélia, la syntaxe elle-même se fragmente, épousant le chaos mental de la mère : questions qui s’enchaînent sans réponse, pensées qui butent contre le mur de l’incompréhension, respirations haletantes transcrites par la ponctuation. Cette adéquation entre forme et contenu évite le piège de la surenchère émotionnelle ; l’auteure fait confiance à la puissance intrinsèque de la situation plutôt qu’aux artifices rhétoriques.
Le vocabulaire spécialisé de la psychologie s’intègre naturellement au tissu narratif sans jamais verser dans le jargon hermétique. Termes comme « érotomanie », « hypervigilance post-traumatique » ou « transfert » trouvent leur place dans le récit parce qu’ils servent la compréhension des mécanismes psychiques à l’œuvre. Les séances de thérapie fonctionnent comme des espaces pédagogiques où ces concepts se déploient à travers le dialogue et l’introspection, rendant accessible au lecteur profane des notions complexes. Cette vulgarisation intelligente constitue l’un des atouts majeurs du roman, qui parvient à instruire sans jamais donner l’impression de délivrer un cours de psychopathologie.
Les monologues intérieurs et journaux intimes révèlent une fine compréhension des différentes voix narratives. Le journal de Maximilian, avec ses justifications délirantes et sa logique tordue, sonne juste dans sa folie. Les lettres posthumes de Clara portent cette pudeur émotionnelle caractéristique du personnage tout en laissant transparaître l’amour longtemps étouffé. Les pensées d’Angèle oscillent entre lucidité et confusion selon son état psychologique du moment. Espalioux démontre ainsi sa capacité à moduler son écriture en fonction des consciences qu’elle habite, créant une polyphonie stylistique qui enrichit considérablement la texture romanesque.
Certaines longueurs peuvent néanmoins ralentir la lecture. Les scènes de consultation se répètent parfois avec des variations mineures, et l’on pourrait reprocher à l’auteure une certaine prolixité dans l’exploration des états d’âme de ses personnages. Les descriptions des mécanismes psychologiques, si elles témoignent d’une connaissance approfondie du sujet, tendent occasionnellement vers l’exhaustivité au détriment du rythme narratif. Ces passages, bien qu’intéressants sur le plan documentaire, auraient gagné à être condensés pour maintenir une tension plus constante. Reste que cette minutie psychologique constitue précisément l’ADN du roman, et que sacrifier cette dimension reviendrait à en dénaturer le projet littéraire.
Les meilleurs polars à dévorer chez amazon
Un roman qui interroge notre rapport à la conscience
Le titre Inconscience résonne bien au-delà du simple moment d’inattention qui déclenche le drame. Espalioux interroge les multiples strates de l’inconscience humaine : celle, banale et quotidienne, qui nous fait consulter notre téléphone au parc ; celle, plus profonde, qui empêche Clara de percevoir pendant des décennies les besoins affectifs de sa fille ; celle, pathologique, qui enferme Maximilian dans son délire érotomaniaque. En tissant ces différents niveaux d’aveuglement, l’auteure construit une réflexion philosophique sur notre difficulté fondamentale à être pleinement présents à nous-mêmes et aux autres. Le roman devient ainsi une méditation sur les failles de la conscience qui traversent l’existence humaine, des plus anodines aux plus tragiques.
La question de la présence au monde traverse tout le récit comme une interrogation lancinante. Combien de fois détournons-nous notre attention de l’essentiel pour nous perdre dans l’accessoire ? Combien de signaux d’alarme ignorons-nous avant qu’il ne soit trop tard ? Espalioux ne moralise pas ; elle constate simplement cette tendance universelle à vivre en pilotage automatique, à laisser notre conscience vagabonder pendant que le réel se déroule. L’épisode du portable au parc fonctionne comme un révélateur brutal : il ne s’agit pas de diaboliser la technologie mais de pointer cette facilité déconcertante avec laquelle nous nous extrayons de l’instant présent. La culpabilité d’Angèle prend alors une dimension collective – qui peut prétendre n’avoir jamais cédé à cette tentation de l’ailleurs ?
Le travail thérapeutique d’Angèle illustre le chemin inverse : celui de la prise de conscience progressive, de l’accès à une lucidité douloureuse mais nécessaire. Les séances avec sa psychologue dessinent une trajectoire de reconquête de la conscience, où il s’agit de regarder en face ce que l’on préférerait refouler, d’assumer sa part de responsabilité sans s’effondrer sous le poids de la culpabilité. Ce processus d’élaboration psychique, minutieusement documenté par l’auteure, montre que la conscience n’est pas un état donné mais une conquête permanente, toujours fragile, toujours à recommencer. La lettre cathartique qu’Angèle adresse à sa mère mourante cristallise cette tension entre ce que l’on sait consciemment et ce que l’inconscient continue de travailler en sourdine.
Inconscience s’impose finalement comme un roman profondément contemporain qui saisit l’air du temps avec acuité. À l’ère de l’hyperconnexion et de l’attention fragmentée, où chacun jongle entre sollicitations multiples, Espalioux pose une question essentielle : que perdons-nous en sacrifiant notre présence au monde sur l’autel de la productivité et de la disponibilité permanente ? Son roman ne apporte pas de réponses définitives mais ouvre un espace de réflexion salutaire. En documentant avec précision les mécanismes psychologiques du traumatisme et de la résilience, en explorant les zones d’ombre des relations familiales, en donnant chair à des personnages qui luttent pour maintenir le cap malgré l’adversité, l’auteure signe une œuvre qui dépasse largement le cadre du thriller pour toucher à des questions universelles. Un premier roman ambitieux qui, malgré quelques longueurs, parvient à conjuguer suspense narratif et profondeur psychologique, faisant d’Inconscience une lecture à la fois prenante et stimulante intellectuellement.
Mots-clés : Thriller psychologique, Culpabilité maternelle, Relations mère-fille, Résilience, Disparition d’enfant, Psychologie familiale, Premier roman
Extrait Première Page du livre
» PROLOGUE
Jour J
12 novembre 2017
Ce dimanche à Vincennes, Angèle emmène sa fille Nélia au Parc Floral. L’absence de Clara pèse lourd sur son cœur. Elle sait que ces moments de partage sont précieux pour sa fille qui adore sa grand-mère, mais aussi pour elle, qui aurait tant besoin de cette présence maternelle pour se sentir complète.
Malgré le froid qui pique les joues, le soleil perce les nuages, réchauffant doucement l’atmosphère de la promenade. La jeune femme et sa petite fille se posent dans une aire de jeu que Nélia apprécie particulièrement pour ses balançoires et ses nombreux toboggans.
Emmitouflée dans sa doudoune, les yeux rivés sur son portable, Angèle fait défiler des vidéos. Fatiguée de penser, elle occupe son esprit à autre chose. Pour diminuer sa charge mentale, lorsqu’elle est en panne d’inspiration, elle consulte des recettes de repas équilibrés sur YouTube. Même si certaines idées sont bonnes à prendre, elle finit souvent par se perdre dans les méandres d’internet, passant des messages d’alertes sur les additifs alimentaires aux bienfaits du régime méditerranéen, sans savoir quoi retenir dans cet océan d’informations contradictoires.
Elle aurait préféré parler de cuisine et des dernières tendances en ligne avec sa maman, buvant du thé chaud dans une tasse isotherme, mais apparemment, Clara a mieux à faire. Une fois le dîner du soir prévu, Angèle peut enfin profiter pleinement de son après-midi avec sa fille et laisser de côté ses ruminations inutiles et encombrantes.
Nélia joue à quelques mètres de sa maman. Les bruits d’enfants et les cris des parents s’entremêlent bruyamment. «
- Titre : Inconscience
- Auteur : Jeanne Espalioux
- Éditeur : Amazon
- Nationalité : France
- Date de sortie : 2025
Résumé
Lorsqu’Angèle, distraite par son portable, manque de vigilance quelques minutes au Parc Floral, sa fille Nélia disparaît. Son mari, Cédrick, s’engage alors avec détermination dans les recherches, tandis qu’elle sombre dans la culpabilité et la détresse. Malgré la force de leur amour, le couple est mis à rude épreuve. Qu’a-t-il pu bien arriver à Nélia? Était-ce la dernière fois qu’ils voyaient leur fille? Pourront-ils à nouveau se regarder en face?
Durant l’enquête, Angèle se réfugie chez sa mère, Clara, une psychiatre réservée et difficile à cerner avec laquelle elle entretient une relation compliquée. Dans ce contexte dramatique, et au fil des consultations, elle compte sur le soutien précieux de sa psychologue pour l’aider à traverser l’adversité dans un seul et unique but : retrouver Nélia et préserver sa famille.
Ce drame familial révèle la brutalité de la vie, la complexité des relations humaines, tout en soulignant l’importance du soutien psychologique et des liens intergénérationnels.

Je m’appelle Manuel et je suis passionné par les polars depuis une soixantaine d’années, une passion qui ne montre aucun signe d’essoufflement.




































Après l’écriture de mon premier manuscrit, tout juste converti en PDF, et guidée par mon intuition, j’ai envoyé une bouteille à la mer, dans l’océan du thriller et du polar, à Monsieur Manuel! J’ai demandé un conseil, un regard, une attention, sans même connaître ton blog et ton travail extraordinaire, que je découvre seulement maintenant! Mon identité d’auteure et de romancière commence officiellement avec toi, Manuel. Merci pour cet accueil généreux, bienveillant et redoutablement percutant. Je dirai que tu as encore mieux cerné mon livre que je ne l’ai fait moi-même! Plus sérieusement, ton analyse à la fois fine et complexe de mon travail, pour le coup, est absolument incroyable. La précision et la profondeur avec laquelle tu as cerné mon écriture, les personnages, la construction et surtout le fond de mon propos, voire de ma propre psychologie sont véritablement chirurgicales. Quel ambassadeur! Merci pour ce lancement, je ne pouvais pas espérer mieux, même dans mes rêves les plus fous. Je dirais que le sentiment d’avoir été comprise, et d’avoir suscité ce que tu décris, sont déjà pour moi une formidable récompense. Surtout que mon livre n’est même pas encore publié sur Amazon, encore quelques heures, mais cela va arriver! Je t’envoie le lien d’achat disponible dès sa mise en ligne. Milles mercis ne suffiraient pas. Bien à toi et longue vie à ton travail d’éclaireur d’âme! Amicalement, Jeanne Espalioux.
Oulalalalalala quel commentaire ! J’en suis rouge de confusion ☺️ C’est MOI qui devrais te remercier pour ce thriller coup de poing ! Ton message me touche énormément, vraiment. Être témoin de cette naissance d’auteure, c’est un privilège immense. J’ai hâte que les lecteurs découvrent « Inconscience » ! Merci pour ta confiance Jeanne, c’est ce genre de rencontres qui donne tout son sens à ce que je fais 🙏