Présentation de l’auteure Katrine Engberg et de son œuvre
Katrine Engberg est une auteure danoise née en 1975 à Copenhague. Avant de se lancer dans l’écriture, elle a étudié la littérature et le théâtre à l’université de Copenhague et a travaillé comme chorégraphe et metteur en scène pour la télévision et le théâtre. C’est dans les années 2000 qu’elle se tourne vers l’écriture de scénarios pour la télévision danoise, notamment pour la série à succès « Vétérinaire à Copenhague ».
Forte de cette expérience dans l’audiovisuel, Katrine Engberg se lance dans l’écriture de romans policiers à partir de 2016 avec « La Fissure », premier tome d’une série mettant en scène le duo d’enquêteurs Jeppe Kørner et Anette Werner. Ce roman connaît un grand succès au Danemark et est vite traduit dans plus de 20 langues. Il est suivi par « Fleur de Cadavre » en 2017, « The Mist » en 2021 et « Rat de verre » en 2022.
En parallèle de cette série policière, Katrine Engberg publie en 2019 « L’enfant étoile », un thriller psychologique qui explore les frontières entre réalité et fiction à travers l’histoire d’un meurtre inspiré d’un roman en cours d’écriture. Ce livre confirme le talent de l’auteure pour créer des intrigues complexes et surprenantes, servies par une écriture fluide et une fine analyse psychologique des personnages.
Les romans de Katrine Engberg se caractérisent par leur ancrage dans la ville de Copenhague, dont elle dépeint avec justesse l’atmosphère et la société. Ses intrigues mêlent habilement polar et réflexion sur des thèmes comme la création artistique, les secrets de famille ou les relations humaines. Son style efficace et son sens du rythme lui valent d’être souvent comparée à Jo Nesbø ou Henning Mankell.
Grâce à la qualité de ses romans, Katrine Engberg s’est imposée en quelques années comme une des nouvelles voix du polar scandinave. Ses livres sont des best-sellers au Danemark et sont traduits dans de nombreux pays. « L’enfant étoile », qui renouvelle avec brio les codes du thriller psychologique, en est une parfaite illustration. L’auteure confirme avec ce roman son goût pour les intrigues originales et son talent pour explorer les recoins sombres de l’âme humaine.
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Résumé général du roman « L’enfant étoile » et de ses principaux thèmes
« L’enfant étoile » de Katrine Engberg est un thriller psychologique publié en 2019 qui nous plonge dans une enquête complexe et fascinante au cœur de Copenhague. L’intrigue s’amorce lorsqu’un meurtre est commis dans un immeuble appartenant à Esther de Laurenti, une ancienne professeure de littérature qui s’est lancée dans l’écriture d’un roman policier. Le choc est d’autant plus grand que la victime est Julie, sa jeune locataire, et que les circonstances du crime ressemblent étrangement à celles décrites dans le manuscrit d’Esther.
L’enquête est menée par deux détectives récurrents des romans de Katrine Engberg : Jeppe Kørner, un homme sensible et intuitif, et Anette Werner, sa collègue opiniâtre et pragmatique. Au fil de leurs investigations, ils découvrent que Julie était une jeune femme pleine de mystères, qui entretenait notamment une relation secrète avec Kristoffer, le professeur de chant d’Esther. Mais lorsque Kristoffer est à son tour retrouvé mort, l’affaire prend une tournure encore plus sombre et il apparaît que tout est lié au trouble passé de Julie et à sa famille.
Au-delà de l’intrigue policière haletante, « L’enfant étoile » explore avec finesse plusieurs thèmes qui s’entremêlent. Le premier est celui de la création littéraire et de ses rapports avec la réalité. À travers le personnage d’Esther et de son roman en gestation, Katrine Engberg interroge la façon dont la fiction peut influencer le réel et le nourrir en retour. Elle montre aussi comment l’écriture peut devenir un exutoire ou un révélateur pour les secrets et les traumatismes enfouis.
Un autre thème central du roman est celui des relations familiales et de leur poids sur la construction identitaire. L’enquête révèle progressivement les failles et les drames qui ont marqué l’histoire de Julie et de ses proches. Les rapports entre parents et enfants, la transmission des blessures et des non-dits, la difficulté à se libérer des déterminismes familiaux sont autant de sujets que Katrine Engberg aborde avec justesse et subtilité.
« L’enfant étoile » offre aussi une plongée passionnante dans différents milieux de Copenhague, notamment celui du théâtre et de la danse. L’auteure s’appuie sur sa connaissance de ces univers pour leur donner une épaisseur et une authenticité remarquables. Elle dépeint avec le même soin les ambiances contrastées des quartiers de la capitale danoise, des ruelles branchées du centre-ville aux paisibles jardins ouvriers de la banlieue.
Mêlant habilement la noirceur du polar scandinave et la finesse d’une étude psychologique, « L’enfant étoile » est un roman riche et captivant. Porté par une construction impeccable et des personnages complexes, ce livre confirme tout le talent de Katrine Engberg pour nous entraîner dans les méandres d’une intrigue où les frontières entre réalité et fiction se troublent. Une lecture intense et envoûtante qui explore avec brio les blessures intimes et leurs répercussions sur plusieurs générations.
Les personnages principaux : Jeppe Kørner, Anette Werner et leurs dynamiques
Dans « L’enfant étoile », Katrine Engberg met en scène deux personnages récurrents de ses romans policiers : les inspecteurs Jeppe Kørner et Anette Werner. Ce duo atypique et attachant forme le cœur vibrant du récit et leur relation complexe apporte une profondeur supplémentaire à l’intrigue.
Jeppe Kørner est un homme d’une quarantaine d’années, sensible et intuitif. Marqué par un divorce difficile, il traverse une période de doutes et de remises en question personnelles qui influencent son travail d’enquêteur. Tout en finesse et en empathie, il a l’art de cerner la psychologie des gens et de déceler leurs failles intimes. Mais cette sensibilité à fleur de peau le rend aussi vulnérable et parfois trop impliqué émotionnellement. Au fil de l’enquête sur la mort de Julie, Jeppe va devoir affronter ses propres démons et apprendre à mieux se protéger.
À ses côtés, Anette Werner apporte un contrepoint plus terre-à-terre et pragmatique. Cette femme vive et déterminée est une enquêtrice expérimentée qui ne s’en laisse pas conter. Derrière ses airs bourrus et ses méthodes parfois abruptes se cache un grand professionnalisme et un sens aigu de la justice. Anette est aussi une épouse et une mère comblée, très attachée à sa famille. Cette vie personnelle épanouie lui permet de garder les pieds sur terre et de tempérer les idéalistes envolées de son coéquipier.
Malgré leurs différences, Jeppe et Anette forment un tandem efficace et complémentaire. Leurs divergences de caractère et d’approche sont source de tensions mais aussi d’émulation. Leurs joutes verbales, souvent teintées d’humour, donnent lieu à des dialogues savoureux qui rythment le récit. Au-delà de leur relation professionnelle, ils sont unis par une vraie affection et un respect mutuel. Chacun trouve en l’autre un soutien précieux pour affronter les traumatismes générés par leur métier.
Au fil de l’enquête sur la mort de Julie, les deux inspecteurs vont être confrontés à leurs propres fêlures. Le murder case va faire resurgir chez Jeppe le deuil inachevé de son mariage et son désir frustré de paternité. Il projette beaucoup de ses émotions dans cette affaire et a du mal à garder la distance nécessaire, ce qui inquiète Anette. De son côté, la jeune femme doit composer avec l’hostilité latente de certains collègues et la culpabilité de délaisser sa famille. Mais leur complicité et leur confiance mutuelle leur permettent de surmonter ces épreuves et d’avancer dans la résolution du crime.
La relation entre Jeppe et Anette est un des points forts du roman. Katrine Engberg réussit à camper en quelques traits des personnages à la fois crédibles et nuancés, dont elle explore habilement les zones d’ombre et les fragilités. La dynamique de ce duo apporte un supplément d’âme à l’intrigue et ancre le récit dans une réalité humaine touchante. On suit avec un plaisir renouvelé leurs échanges complices, leurs doutes existentiels et leur ténacité face à l’adversité. Deux enquêteurs imparfaits et attachants, à l’image de cette enquête qui bouleverse leurs certitudes.
Le rôle central de l’écrivaine Esther de Laurenti et de son manuscrit
Dans « L’enfant étoile », le personnage d’Esther de Laurenti occupe une place centrale et incarne le lien fascinant entre réalité et fiction qui est au cœur du roman. Cette ancienne professeure de littérature à l’université de Copenhague s’est lancée sur le tard dans l’écriture d’un roman policier. Mais lorsque le meurtre de sa jeune locataire, Julie, semble tout droit sorti de son manuscrit, Esther se retrouve malgré elle au centre d’une enquête qui la dépasse.
Katrine Engberg dresse un portrait subtil et nuancé de cette femme solitaire et un peu excentrique, qui vit entourée de ses livres et de ses deux carlins dans un appartement en désordre. Derrière ses airs fantasques et son goût pour le vin rouge, Esther cache une grande sensibilité et une blessure intime liée à un avortement subi dans sa jeunesse. C’est en partie pour exorciser ce traumatisme qu’elle s’est lancée dans l’écriture, trouvant dans la fiction un moyen d’explorer ses propres zones d’ombre.
Son roman en cours d’écriture, dont des extraits parsèment le récit, joue un rôle clé dans l’intrigue. Écrit à la première personne, il met en scène une jeune femme, inspirée de Julie, qui tombe sous la coupe d’un homme mystérieux et manipulateur. Quand la réalité rejoint la fiction de façon troublante, Esther est persuadée que quelqu’un de son entourage a lu son manuscrit et s’en est servi comme un mode d’emploi pour commettre le crime. Rongée par la culpabilité, elle va tout faire pour aider les enquêteurs à trouver le coupable.
Au fil du récit, le manuscrit d’Esther apparaît comme un véritable personnage à part entière. Par un habile jeu de miroirs, il influence autant la réalité qu’il s’en nourrit. Les extraits du roman, insérés en contrepoint de l’intrigue principale, éclairent d’un jour nouveau les événements et les relations entre les protagonistes. Ils instillent aussi un sentiment de malaise et de confusion, comme si la fiction contaminait le réel pour le rendre plus troubles et menaçant.
À travers ce roman dans le roman, Katrine Engberg questionne le pouvoir et les dangers de la fiction. Elle montre comment l’écriture peut être une arme à double tranchant, un instrument de révélation mais aussi de manipulation. Le manuscrit d’Esther agit comme un catalyseur qui précipite le destin des personnages et fait ressurgir les secrets enfouis. Il est à la fois une clé pour comprendre les motivations du tueur et un miroir qui renvoie chacun à ses propres failles.
Mais au-delà de sa fonction de moteur de l’intrigue, l’écrivaine Esther de Laurenti est aussi un personnage touchant et complexe. Sa solitude, ses doutes et ses blessures intimes en font un être profondément humain, qui suscite tour à tour l’empathie, l’agacement et la méfiance. Sa fascination ambiguë pour la jeune Julie, en qui elle projette ses propres fantasmes et ses regrets, trouble autant qu’elle émeut. À travers elle, Katrine Engberg explore la part d’ombre qui sommeille en chacun et la façon dont la création peut être un exutoire autant qu’un révélateur.
Véritable mise en abyme, le manuscrit d’Esther de Laurenti est la clé de voûte de ce formidable thriller psychologique. Tel un miroir déformant, il reflète les zones d’ombre de l’intrigue et de ses acteurs, tout en brouillant les frontières entre réel et imaginaire. Une création littéraire fascinante, à la mesure de ce personnage rare et lumineux, qui incarne toute l’ambivalence de l’acte créateur.
Une intrigue policière complexe mêlant réalité et fiction
Dans « L’enfant étoile », Katrine Engberg nous plonge au cœur d’une intrigue policière complexe et captivante qui joue habilement avec les frontières entre réalité et fiction. Tout commence par le meurtre brutal de Julie, une jeune femme retrouvée dans son appartement de Copenhague. Mais ce crime sordide prend vite une tournure étrange lorsqu’il apparaît que les circonstances de sa mort ressemblent étrangement à celles décrites dans le manuscrit d’Esther de Laurenti, sa logeuse et aspirante romancière.
Au fil de l’enquête menée par Jeppe Kørner et Anette Werner, les liens entre le réel et la fiction se brouillent de plus en plus. Chaque découverte sur le passé de Julie et ses relations semble faire écho au roman d’Esther, comme si le meurtrier s’en était inspiré ou cherchait à le reproduire dans les moindres détails. Cette troublante mise en abyme instille un sentiment de malaise et remet en question la frontière entre l’imaginaire et le vécu.
Habilement, Katrine Engberg intègre des extraits du manuscrit d’Esther en contrepoint du récit principal. Ces passages, écrits à la première personne, révèlent peu à peu la personnalité fascinante et ambiguë de la victime, tout en éclairant d’un jour nouveau les motivations des différents protagonistes. Par un jeu de miroirs savamment orchestré, l’auteure nous entraîne dans un dédale de fausses pistes et de révélations où chaque certitude est remise en cause.
Mais cette intrigue n’est pas seulement un brillant exercice de style. En entremêlant le réel et la fiction, Katrine Engberg explore avec finesse la part d’ombre qui sommeille en chacun et la façon dont nous projetons nos fantasmes et nos peurs dans les histoires que nous lisons ou écrivons. Le roman d’Esther apparaît alors comme un révélateur des désirs inavoués et des secrets enfouis des personnages, faisant ressurgir à la surface des vérités longtemps refoulées.
Au-delà du mystère de la mort de Julie, l’enquête va peu à peu lever le voile sur les drames intimes qui ont façonné sa vie et celle de ses proches. Les failles et les traumatismes familiaux se révèlent être la clé pour comprendre le présent et dénouer l’énigme. Dans cette quête de vérité, la fiction se fait tour à tour alliée et ennemie, éclairant des zones d’ombre tout en semant le doute sur la réalité des faits.
Jusqu’au dénouement final, le lecteur est tenu en haleine par les rebondissements d’une intrigue qui ne cesse de se réinventer. Avec un art consommé du suspense et de la manipulation, Katrine Engberg nous entraîne dans les méandres d’une enquête où chaque certitude est ébranlée. La frontière entre le vrai et le faux se trouble jusqu’à devenir poreuse, nous plongeant dans un vertige existentiel qui questionne notre rapport à la fiction.
« L’enfant étoile » est un formidable thriller psychologique qui joue avec les codes du genre pour mieux les dépasser. Mêlant avec virtuosité réalité et fiction, cette enquête à tiroirs explore les recoins les plus sombres de l’âme humaine et la puissance de l’imaginaire. Un récit d’une finesse et d’une complexité rares, qui confirme le talent immense de Katrine Engberg pour créer des intrigues authentiques et déstabilisantes, à l’image de la vie elle-même.
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L’importance des relations familiales et amoureuses des personnages
Dans « L’enfant étoile », les relations familiales et amoureuses des personnages occupent une place centrale et s’avèrent être la clé pour comprendre les drames du présent. Avec une grande finesse psychologique, Katrine Engberg explore les liens complexes qui unissent les protagonistes et la façon dont leurs histoires intimes influencent le cours de l’intrigue.
Au cœur du roman se trouve la figure fascinante et ambiguë de Julie, la jeune victime. Au fil de l’enquête, on découvre que ses relations familiales sont marquées par le manque et la souffrance. Ayant perdu sa mère très jeune, elle a grandi avec un père aimant mais étouffant, qui reporte sur elle tous ses espoirs et ses frustrations. Ce lien exclusif et malsain sera le terreau de bien des tourments pour Julie, l’empêchant de s’épanouir et de couper le cordon. Son histoire douloureuse résonne en écho avec celle d’Esther, son double en écriture, qui a elle aussi connu le poids des non-dits familiaux.
Les relations amoureuses jouent également un rôle déterminant dans le parcours des personnages. Julie apparaît tiraillée entre deux hommes : Kristoffer, le professeur de chant avec qui elle entretient une liaison secrète, et un mystérieux inconnu qui semble exercer sur elle une troublante fascination. À travers ces relations en clair-obscur, on perçoit sa quête éperdue d’amour et de reconnaissance, comme pour combler le vide laissé par l’absence maternelle. Mais ces liaisons se révèlent plus toxiques que salvatrices, l’entraînant dans une spirale autodestructrice.
En contrepoint de ces histoires de solitude et d’amours contrariées, le couple formé par Jeppe et Anette apporte une bouffée d’air et d’espoir. Malgré leurs différences, les deux enquêteurs sont unis par une profonde affection et un respect mutuel. Leur complicité, faite de taquineries et de silences complices, agit comme un baume apaisant au cœur de l’horreur. On sent que leur relation est un rempart essentiel pour affronter la noirceur de leur métier et les démons intérieurs qui les habitent.
Car si Anette peut compter sur le soutien indéfectible de son mari et de ses enfants, Jeppe est lui aussi un être blessé. Son divorce douloureux et son désir inassouvi de paternité ont laissé des traces indélébiles, qui trouvent un écho troublant dans l’enquête. En se plongeant dans l’intimité de Julie et de ses proches, il affronte ses propres fantômes et ses regrets enfouis. Cette enquête sera pour lui un chemin de résilience, une façon de faire la paix avec son histoire et d’accepter sa part d’ombre.
Avec une grande justesse et une infinie délicatesse, Katrine Engberg met en lumière la façon dont nos liens familiaux et amoureux façonnent notre identité et notre destin. Dans « L’enfant étoile », les drames du présent prennent racine dans les blessures du passé, dans ces souffrances secrètes transmises de génération en génération. En explorant les méandres de l’intime, l’auteure nous offre une plongée saisissante dans la complexité des rapports humains et la part d’ombre qui sommeille en chacun de nous.
Tel un fil rouge courant tout au long du récit, les relations familiales et amoureuses tissent une toile dense et captivante où s’entremêlent les destins. Par petites touches impressionnistes, Katrine Engberg dresse le portrait nuancé d’êtres cabossés par la vie, qui tentent de se reconstruire malgré le poids des héritages et des non-dits. Une fresque intime et puissante, qui sonde avec acuité les failles de l’âme humaine et la force des liens qui nous unissent.
Une plongée dans les milieux artistiques et littéraires de Copenhague
Dans « L’enfant étoile », Katrine Engberg nous entraîne dans une exploration captivante des milieux artistiques et littéraires de Copenhague. Véritable personnage à part entière, la capitale danoise se révèle être le théâtre d’une vie culturelle bouillonnante, où se côtoient écrivains, musiciens et comédiens. Avec un sens du détail et de l’atmosphère remarquable, l’auteure nous plonge dans cet univers singulier, qui forme la toile de fond de son intrigue aux multiples facettes.
Le monde de l’écriture est incarné par Esther de Laurenti, ancienne professeure de littérature reconvertie en romancière sur le tard. À travers ce personnage attachant et complexe, Katrine Engberg explore avec finesse les affres de la création et les doutes qui assaillent tout écrivain. Les scènes où l’on voit Esther peiner sur son manuscrit, osciller entre jubilation et découragement, sonnent incroyablement juste. Elles témoignent de la fascination de l’auteure pour le processus mystérieux de l’écriture, et de sa volonté d’en percer les arcanes.
L’intrigue nous entraîne aussi dans les coulisses du Théâtre royal danois, où travaille le jeune et énigmatique Kristoffer. Katrine Engberg, qui a elle-même œuvré pour cette auguste institution, restitue avec un luxe de détails cet univers à part, fait de rituels immuables et de superstitions tenaces. Des loges aux cintres en passant par le plateau, elle nous fait partager le quotidien d’une troupe, avec ses rivalités, ses amitiés, ses rêves et ses déceptions. Un huis clos étrange et envoûtant, où la magie du spectacle côtoie une réalité plus sombre et triviale.
Au fil des chapitres, d’autres lieux emblématiques de la scène culturelle de Copenhague prennent vie sous la plume alerte de l’auteure. Ainsi de La Maison des étudiants, salle de concerts mythique où se produisent les groupes les plus avant-gardistes de la ville. Ou encore des multiples cafés et librairies où se retrouvent les artistes et les intellectuels pour refaire le monde autour d’un verre. Chacun de ces endroits est dépeint avec un soin méticuleux, qui restitue leur charme singulier et leur permet d’exister pleinement dans l’imaginaire du lecteur.
Mais loin de n’être qu’un simple décor, ce milieu artistique et littéraire joue un rôle essentiel dans l’intrigue. C’est par lui que transitent les secrets, les rumeurs et les rivalités qui vont nourrir l’enquête. Les réseaux d’amitiés et d’inimitiés qui lient les différents protagonistes, les jeux de pouvoir et d’influence, les amours contrariées et les ambitions déçues : autant d’éléments qui trouvent leur source dans cet univers à part, où les apparences sont souvent trompeuses.
Plus qu’un simple thriller, « L’enfant étoile » est aussi un formidable roman sur la création et ses tourments. En nous plongeant dans l’intimité d’artistes et d’écrivains, Katrine Engberg interroge avec acuité la frontière ténue entre l’art et la vie, la fiction et la réalité. Elle explore la façon dont la création peut être un exutoire autant qu’un révélateur, un miroir de nos désirs inavoués et de nos failles intimes.
Cette immersion dans les milieux artistiques et littéraires de Copenhague confère une profondeur et une densité rares à l’intrigue policière. Servie par une écriture ciselée et une construction impeccable, elle transforme le roman en une oeuvre kaléidoscopique, qui captive autant par son suspense que par sa dimension existentielle. Une plongée envoûtante dans l’envers du décor, qui révèle toute l’ambivalence de la création et la complexité de l’âme humaine.
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Un thriller scandinave entre tension et poésie : La signature de Katrine Engberg
Dans « L’enfant étoile », Katrine Engberg confirme son immense talent de conteuse et son aptitude rare à créer des atmosphères envoûtantes. Son style d’une grande fluidité et d’une précision remarquable est au service d’une intrigue à la mécanique parfaitement huilée, qui maintient le lecteur en haleine jusqu’à la dernière page.
Un des grands atouts de l’écriture de Katrine Engberg est sa capacité à faire vivre et vibrer ses personnages. Par petites touches d’une grande subtilité, elle dresse le portrait d’êtres complexes et nuancés, dont elle explore avec finesse les zones d’ombre et les contradictions intimes. Chaque protagoniste, même secondaire, est campé en quelques phrases ciselées qui en font un individu à part entière, avec son histoire, ses fêlures et ses aspirations secrètes. Loin des stéréotypes habituels du polar, les personnages de « L’enfant étoile » sont d’une authenticité et d’une profondeur rares, qui les rendent terriblement attachants et humains.
Katrine Engberg possède aussi un sens aigu du rythme et du tempo, qui donne à son récit une pulsation captivante. Alternant scènes d’action et moments d’introspection, dialogues vifs et descriptions minutieuses, elle maintient le lecteur dans un état de tension permanente, tout en se ménageant des respirations nécessaires à l’approfondissement psychologique. Cette maîtrise des variations et des ruptures de ton insuffle à l’intrigue un dynamisme et un souffle romanesques particulièrement séduisants.
Mais la grande force de la romancière réside dans son art consommé de l’atmosphère. Héritière de la grande tradition du polar scandinave, elle excelle à restituer la singularité de son cadre et à en faire un acteur à part entière de l’intrigue. Sous sa plume, Copenhague se révèle dans toute sa complexité, tour à tour lumineuse et inquiétante, fascinante et oppressante. Des ruelles sombres du centre-ville historique aux quais animés du port, des salons cossus de la bourgeoisie locale aux arrière-salles des cafés underground, elle dresse le portrait vivant et contrasté d’une ville qui porte en elle toutes les contradictions de notre époque.
Tout l’art de Katrine Engberg est de faire de cette atmosphère urbaine la caisse de résonance des tourments intérieurs de ses personnages. Par un habile effet de miroir, la ville se fait le reflet des états d’âme des protagonistes, de leurs peurs, de leurs doutes et de leurs espoirs informulés. Cette interaction constante entre décor et intériorité donne à « L’enfant étoile » une dimension quasi-cinématographique et une puissance d’évocation qui happent le lecteur dès les premières pages.
Servi par une écriture ciselée et une construction sans faille, le roman de Katrine Engberg confirme sa place de nouveau maître du thriller psychologique. Sa capacité rare à conjuguer intrigue haletante et exploration intime, atmosphère envoûtante et réflexion existentielle en fait une œuvre d’une densité et d’une intensité rares, bien au-delà des codes traditionnels du genre.
En définitive, le style unique de Katrine Engberg, tout en subtilité et en profondeur, confère à « L’enfant étoile » un charme vénéneux particulièrement addictif. Mêlant avec maestria les codes du polar et du roman psychologique, elle signe un récit d’une virtuosité impressionnante, porté par une écriture aussi sensuelle que cruelle, à l’image de ses personnages inoubliables. Une expérience de lecture intense et captivante, qui ne laisse pas indemne et impose définitivement Katrine Engberg comme une des nouvelles reines du thriller venue du Nord.
Les réflexions soulevées par le roman sur la création et ses liens avec la réalité
Au-delà de son intrigue policière captivante, « L’enfant étoile » est aussi une réflexion subtile et nuancée sur les liens mystérieux qui unissent la création artistique et la réalité. À travers le personnage d’Esther, romancière en herbe dont le manuscrit semble prédire les événements tragiques, Katrine Engberg interroge la façon dont la fiction peut influencer le réel, le façonner, et parfois même le devancer.
Tout au long du récit, l’écriture apparaît comme un acte éminemment puissant et ambivalent. Source de révélation et d’émancipation pour Esther, qui y trouve un moyen d’exorciser ses démons intérieurs, elle se révèle aussi être un instrument de manipulation et de pouvoir. Le manuscrit de la romancière, avec ses troublantes similitudes avec les faits divers qui ensanglantent Copenhague, agit comme un miroir déformant, qui brouille les frontières entre imaginaire et réalité. Il met en abyme les peurs, les fantasmes et les pulsions secrètes des personnages, et les précipite vers leur destin tragique.
Mais plus qu’un simple ressort dramatique, ce jeu de reflets entre fiction et réalité est l’occasion pour Katrine Engberg de questionner la responsabilité de l’écrivain et la portée de son geste créateur. En faisant de son manuscrit le catalyseur des événements meurtriers, Esther est-elle coupable, complice ou simple témoin des drames qui se jouent ? Cette interrogation lancinante, qui hante la romancière tout au long du récit, en dit long sur la fascination et la méfiance que suscite l’acte d’écrire, dans sa capacité à donner corps à nos démons intérieurs et à leur offrir une prise sur le monde réel.
Au fil des pages, l’auteure explore avec finesse la façon dont la création artistique s’ancre dans l’intime et s’en nourrit. Les failles et les blessures secrètes des personnages, les non-dits et les traumatismes enfouis trouvent un écho troublant dans le manuscrit d’Esther, comme si la fiction avait le pouvoir de révéler ce qui est tu, de mettre en lumière les angles morts de nos existences. Dans ce ballet subtil entre ombre et lumière, mensonge et vérité, l’écriture apparaît comme un chemin vers la connaissance de soi et des autres, un moyen privilégié pour affronter nos fantômes et exorciser nos peurs les plus secrètes.
Mais « L’enfant étoile » est aussi une méditation sur la part d’inexpliqué et de mystère qui nimbe le geste créateur. Le processus qui conduit Esther de l’inspiration à la mise en mots reste en partie insaisissable, comme mû par une nécessité intérieure qui la dépasse. En explorant les affres et les tourments de la création, le roman rend hommage à cette part d’ombre et d’irrationnel qui préside à l’écriture, à cette alchimie secrète qui transmute nos vies en récits, nos douleurs en œuvres d’art.
Livre dans le livre, jeu de miroirs et d’illusions, « L’enfant étoile » est une variation infiniment subtile sur les pouvoirs et les vertiges de la fiction. Mêlant avec maestria réflexion métaphysique et tension romanesque, le roman de Katrine Engberg interroge notre rapport à l’imaginaire et à ses productions, la façon dont les histoires que nous lisons et écrivons façonnent nos existences et leur donnent un sens.
En faisant du manuscrit d’Esther le cœur vibrant de son intrigue, Katrine Engberg signe une oeuvre profonde et lumineuse sur le mystère de la création littéraire. Une méditation envoûtante sur les liens secrets qui unissent l’art et la vie, le mensonge et la vérité, nos fictions intimes et le monde qui nous entoure. Véritable jeu de pistes littéraire, « L’enfant étoile » explore avec un brio remarquable la part d’ombre et de lumière qui nimbe tout geste créateur, et la façon dont l’écriture peut se faire tour à tour miroir, refuge et révélateur de nos âmes. Un vertigineux pas de deux entre réalité et fiction, qui confirme le talent unique de Katrine Engberg et son aptitude rare à ausculter les méandres de la psyché humaine.
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Quand le polar devient art : Un thriller à la fois sombre et lumineux
Avec « L’enfant étoile », Katrine Engberg signe un roman d’une densité et d’une intensité rares, qui confirme son immense talent de conteuse et sa capacité à renouveler avec brio les codes du thriller psychologique. Portée par une construction impeccable et une écriture d’une grande finesse, cette œuvre envoûtante et cruelle nous entraîne dans une intrigue complexe et passionnante, qui tient le lecteur en haleine jusqu’à la dernière page.
Un des grands atouts du roman est sa galerie de personnages d’une profondeur et d’une justesse psychologique remarquables. De la fascinante et ambiguë Esther au duo d’enquêteurs attachants et contrastés que forment Jeppe et Anette, en passant par la troublante figure de Julie, chaque protagoniste est campé avec un soin et une subtilité qui les rendent incroyablement vivants et nuancés. Loin des stéréotypes convenus du genre, Katrine Engberg dresse le portrait d’êtres cabossés par la vie, habités par des failles et des blessures secrètes qui les rendent terriblement humains et attachants.
L’autre grande réussite du roman est sa capacité à mêler avec un naturel confondant intrigue policière haletante et réflexion métaphysique sur la création et ses pouvoirs. Le motif central du manuscrit d’Esther, avec ses troublantes résonances avec les drames qui se jouent, est l’occasion pour l’auteure d’explorer les liens mystérieux qui unissent réalité et fiction, la façon dont l’écriture peut influencer le cours des événements et révéler les angles morts de nos existences. Cette virtuose mise en abyme confère au récit une profondeur et une puissance d’évocation rares, qui le hisse bien au-delà des canons du polar traditionnel.
Il faut aussi saluer l’art consommé avec lequel Katrine Engberg restitue l’atmosphère singulière de Copenhague et de ses milieux artistiques et littéraires. Avec un sens du détail et un talent de l’évocation remarquables, elle fait de la capitale danoise un véritable personnage à part entière, tour à tour lumineuse et inquiétante, bouillonnante de vie et lourde de secrets. Cette topographie intime et contrastée, qui épouse les états d’âme et les tourments des protagonistes, donne au roman une épaisseur et un charme vénéneux particulièrement addictifs.
Porté par une écriture ciselée et une construction sans faille, « L’enfant étoile » est de ces livres qui ne laissent pas indemne. Thriller psychologique redoutablement efficace doublé d’une méditation subtile sur les pouvoirs de la fiction, il confirme le talent immense de Katrine Engberg et sa capacité à transcender les genres pour créer une œuvre aussi captivante que profonde. Une expérience de lecture intense et envoûtante, qui interroge avec acuité notre rapport à la vérité et au mensonge, à l’art et à la vie.
En fin de compte, « L’enfant étoile » s’impose comme un véritable page-turner à l’architecture sophistiquée et à la puissance d’évocation remarquable. Mêlant avec un brio rare la noirceur du polar scandinave et la finesse d’une étude psychologique et littéraire, ce roman marque l’éclatante confirmation de Katrine Engberg comme une Reine du thriller venue du Nord. Un must absolu pour tous les amateurs d’intrigues complexes, de personnages profondément humains et d’atmosphères envoûtantes. Un coup de cœur!
Mots-clés : Thriller psychologique, Réalité et fiction, Milieux artistiques, Copenhague, Secrets de famille
Extrait Première Page du livre
» PROLOGUE
La poussière des lourds rideaux tourbillonnait dans la lumière matinale. Gregers Hermansen s’assit dans son fauteuil inclinable et contempla la danse des particules dans le salon. Il lui fallait désormais tant de temps pour se réveiller que cela ne valait presque pas la peine de se lever. Il posa les mains sur les accoudoirs usés, laissa aller sa tête vers l’arrière et, la mâchoire tombante, ferma les yeux sur le scintillement de la lumière, jusqu’à ce qu’il entende le gargouillis de la cafetière dans la cuisine.
Après un bref compte à rebours, il se hissa hors du fauteuil, enfila ses pantoufles et s’avança à petits pas vers le linoléum de la cuisine. Toujours le même chemin, le long du buffet en acajou, devant le fauteuil vert et enfin vers cette satanée poignée que l’aide à domicile avait fixée au mur l’année précédente. « Je me débrouille très bien sans, merci », avait-il insisté, en vain.
Il enleva le filtre à café usagé et le jeta dans la poubelle sous l’évier. Pleine, une fois de plus. Gregers dégagea le sac-poubelle du bac puis, s’appuyant sur le bord de la table, atteignit la porte de service qu’il ouvrit de sa main libre. Au moins, il pouvait encore descendre ses propres poubelles. Il lorgna en direction de la collection de bouteilles de la voisine, sur le palier du dessus. Esther de Laurenti, la reine des pochtronnes. Elle organisait pour ses amis artistes des dîners hystériques qui se prolongeaient jusqu’au petit matin. Mais c’était son immeuble, il était donc inutile de se plaindre.
Les marches tanguaient sous ses pas. Il s’agrippa encore plus fermement à la rampe. Il serait peut-être plus sage de déménager pour un endroit mieux adapté, mais il avait vécu toute sa vie au centre de Copenhague et préférait prendre des risques avec ces marches tordues que d’aller moisir dans une maison de retraite en périphérie. Une fois arrivé au premier, il posa le sac et s’adossa au cadre de la porte des voisines du dessous. Les deux jeunes étudiantes qui partageaient l’étage étaient pour lui source d’un perpétuel agacement, mais aussi d’un étrange désir secret. Leurs sourires insouciants éveillaient en lui des souvenirs de nuits d’été au bord du canal et de baisers amoureux. L’époque où tout était possible, où la vie n’était pas encore sur le point de se terminer. «
- Titre : L’enfant étoile
- Titre original : Krokodillevogteren
- Auteur : Katrine Engberg
- Éditeur : Editions Plon
- Nationalité : Danemark
- Date de sortie : 2021
Je m’appelle Manuel et je suis passionné par les polars depuis une soixantaine d’années, une passion qui ne montre aucun signe d’essoufflement.