Présentation du roman et de l’auteur
« L’Affaire Bramard », paru en 2024 aux Éditions du Masque, est le premier roman de la série Bramard et Arcadipane de l’auteur italien Davide Longo. Cet ouvrage marque le début d’une nouvelle série mettant en scène le commissaire Corso Bramard et son équipe. Les lecteurs, conquis par cet anti-héros complexe et torturé, étaient impatients de le découvrir dans une enquête qui s’annonçait d’ores et déjà palpitante. Avec « L’Affaire Bramard », Davide Longo inaugure avec brio cette nouvelle série prometteuse.
Le roman nous plonge au cœur d’une investigation sur une série de meurtres de jeunes femmes, avec en toile de fond l’affaire Automnal, une sombre histoire datant de vingt ans qui hante toujours le commissaire Bramard. Cette intrigue principale est l’occasion pour Davide Longo d’explorer avec finesse et profondeur les thèmes qui lui sont chers, comme la quête de la vérité, la rédemption, la frontière parfois ténue entre le bien et le mal. Ses personnages, à commencer par Corso Bramard lui-même, se débattent dans les zones grises de l’existence, confrontés à leurs propres démons.
Davide Longo, né en 1971, est un écrivain italien reconnu, lauréat de nombreux prix littéraires dans son pays. Auteur eclectique, il a publié des romans, des recueils de nouvelles, des pièces de théâtre, des livres pour enfants. Il enseigne également l’écriture créative et collabore régulièrement avec la presse. En janvier 2010, il publie chez Fandango son troisième roman, L’uomo verticale, qui remporte le Prix des Lecteurs de Lucques. L’été de la même année, il publie Il signor Mario, Bach e i settanta (Keller Editore). En 2011 paraît le roman Ballata di un amore italiano.
En 2014, il publie Il caso Bramard, le premier roman de la série Bramard et Arcadipane, suivi de Così giocano le bestie giovani en 2018 et de Una rabbia semplice en 2021. En 2022, il publie le quatrième épisode de la série, La vita paga il sabato, suivi en 2023 de Requiem di provincia. Sa série avec le commissaire Bramard, plus ancrée dans le genre policier, révèle une autre facette de son talent, toujours avec cette écriture ciselée et cette capacité à sonder les âmes et les tourments humains.
Avec « L’Affaire Bramard », Davide Longo confirme son statut d’auteur incontournable dans le paysage du polar européen. Son écriture maîtrisée, son sens du rythme et ses intrigues parfaitement architecturées en font un digne héritier des maîtres du roman noir italien comme Scabarino ou Carlotto. Mais au-delà d’une enquête criminelle haletante, le roman est avant tout un formidable portrait d’homme avec Corso Bramard, un personnage inoubliable, à la fois dur et vulnérable, rongé par ses échecs et ses blessures intimes. Une plongée saisissante dans les méandres de l’âme humaine.
Livres de Davide Longo chez Amazon
Résumé de l’intrigue et des principaux rebondissements
« L’Affaire Bramard » de Davide Longo nous entraîne dans une enquête palpitante menée par le commissaire Corso Bramard, un personnage complexe et torturé qui tente de faire la lumière sur une série de meurtres de jeunes femmes. Dès les premières pages, le lecteur est happé par l’intrigue lorsque Bramard reçoit une mystérieuse lettre liée à l’affaire Automnal, une sombre histoire vieille de vingt ans qui le hante toujours. Ce premier rebondissement relance une enquête que Bramard pensait classée et fait resurgir ses vieux démons.
Épaulé par son fidèle adjoint Arcadipane et la jeune et impétueuse Isa Mancini, Bramard va progressivement découvrir que les meurtres récents sont étroitement liés à l’affaire Automnal. Le passé ressurgit de manière brutale et inattendue, obligeant le commissaire à replonger dans ses souvenirs les plus douloureux, notamment la mort tragique de sa femme et de sa fille. Chaque nouvel indice, chaque rebondissement le rapproche un peu plus de la vérité mais aussi de ses propres blessures intimes.
L’enquête prend un tour nouveau lorsque Bramard et son équipe découvrent l’existence des « belles ronfleuses », une sordide affaire de jeunes filles droguées et abusées par des notables de la ville. Cette révélation fait le lien entre les meurtres actuels et l’affaire Automnal, ajoutant une dimension politique et sociale à l’intrigue. Bramard comprend que pour arrêter le tueur, il va devoir affronter des personnalités influentes et briser la loi du silence qui entoure ces crimes depuis des années.
Alors que l’étau se resserre autour du coupable, Bramard et ses proches deviennent à leur tour des cibles. Le commissaire doit agir vite pour protéger ceux qu’il aime et confondre l’assassin avant qu’il ne soit trop tard. Dans une course contre la montre haletante, Bramard va finalement se retrouver face au tueur pour un dénouement aussi inattendu que bouleversant, qui révèlera toute la complexité des liens entre les personnages et la profondeur des blessures passées.
Avec une construction parfaitement maîtrisée, Davide Longo nous offre un polar d’une rare intensité, où chaque rebondissement nous plonge un peu plus dans les méandres de l’âme humaine. Le passé et le présent s’entrechoquent, les masques tombent, révélant la noirceur tapie derrière les apparences. Plus qu’une simple enquête criminelle, « L’Affaire Bramard » est une plongée dans les ténèbres de l’homme, une exploration puissante et dérangeante de la part d’ombre qui sommeille en chacun de nous.
Analyse des personnages clés : Corso Bramard, Arcadipane, Isa Mancini
Au cœur de « L’Affaire Bramard », trois personnages se distinguent par leur complexité et leur profondeur : le commissaire Corso Bramard, son adjoint Arcadipane et la jeune recrue Isa Mancini. Véritables piliers du récit, ils incarnent chacun à leur manière les thèmes chers à Davide Longo, comme la quête de vérité, la rédemption et la part d’ombre qui sommeille en chaque être humain.
Corso Bramard est sans conteste le personnage le plus fascinant et le plus ambigu du roman. Flic tourmenté, rongé par les échecs et les blessures du passé, il incarne à merveille la figure de l’anti-héros. Hanté par l’affaire Automnal et la mort tragique de sa femme et de sa fille, il se débat avec ses propres démons tout en essayant de résoudre l’enquête. Bramard est un être complexe, à la fois dur et vulnérable, capable de violence mais aussi de compassion. À travers lui, Davide Longo explore avec finesse les zones grises de l’âme humaine, ces espaces troubles où le bien et le mal se confondent.
Face à Bramard, Arcadipane apparaît comme un contrepoint lumineux. Adjoint fidèle et intègre, il est le roc sur lequel Bramard peut s’appuyer dans les moments de doute. Leur relation, faite de respect mutuel et d’une profonde complicité, est l’un des points forts du roman. Arcadipane incarne une forme de stabilité et de droiture dans un monde chaotique, sans pour autant être dénué de nuances. Lui aussi a ses failles et ses secrets, qu’il affronte avec courage et détermination.
Le personnage d’Isa Mancini apporte quant à lui une touche de fraîcheur et d’insolence dans ce duo bien rodé. Jeune recrue impulsive et brillante, elle bouscule les habitudes de Bramard et Arcadipane par son aplomb et son indépendance d’esprit. Mais derrière sa façade rebelle, Isa cache elle aussi des blessures profondes, notamment liées à son père, un ancien policier aux méthodes troubles. Sa quête de vérité et de justice résonne avec celle de Bramard, créant entre eux un lien particulier, à mi-chemin entre la filiation et la confrontation.
Plus que de simples adjuvants dans l’enquête, Arcadipane et Isa sont de véritables révélateurs pour Bramard. Par leurs regards et leurs interrogations, ils obligent le commissaire à affronter ses propres contradictions et à Explorer des pistes qu’il aurait préféré ignorer. Ensemble, ils forment un trio imparfait mais complémentaire, uni par un même désir de vérité et de rédemption. Leur humanité, avec ses forces et ses faiblesses, donne au roman une profondeur et une intensité rares.
Avec ces trois personnages aussi attachants que troublants, Davide Longo signe un formidable portrait d’âmes blessées en quête d’apaisement. Bramard, Arcadipane et Isa incarnent chacun à leur manière la complexité de la nature humaine, oscillant sans cesse entre lumière et ténèbres. Une magnifique leçon d’humanité qui confère au roman toute sa puissance émotionnelle.
À découvrir ou à relire
L’affaire Automnal : une enquête complexe au cœur du récit
Au cœur de « L’Affaire Bramard », une enquête ancienne resurgit avec force : l’affaire Automnal. Cette sombre histoire, vieille de vingt ans, est le fil rouge qui relie tous les événements du roman et hante le commissaire Corso Bramard depuis toutes ces années. Plus qu’une simple toile de fond, l’affaire Automnal est le véritable moteur du récit, le nœud gordien que Bramard va devoir démêler pour espérer trouver la paix.
Tout commence lorsque Bramard reçoit une mystérieuse lettre liée à l’affaire Automnal, une série de meurtres de jeunes femmes qu’il n’a jamais pu élucider. Cette lettre fait resurgir en lui des souvenirs douloureux, notamment la mort tragique de sa femme et de sa fille, assassinées par le tueur qu’il traquait. Cet échec personnel et professionnel a laissé des traces indélébiles chez Bramard, le plongeant dans un abîme de culpabilité et de désespoir. L’affaire Automnal est donc bien plus qu’une simple enquête pour lui : c’est une blessure intime, un traumatisme qui a façonné l’homme qu’il est devenu.
Mais cette lettre est aussi le début d’une nouvelle piste, d’un espoir de résoudre enfin cette affaire qui le ronge depuis si longtemps. Au fil de ses investigations sur les meurtres récents, Bramard va découvrir que tout est lié à l’affaire Automnal. Les victimes, les suspects, les mobiles… tout semble ramener à ce tueur insaisissable qui a brisé sa vie vingt ans plus tôt. Chaque indice, chaque révélation est une pièce du puzzle qui s’assemble peu à peu, dévoilant une vérité aussi complexe que dérangeante.
Car l’affaire Automnal n’est pas qu’une simple histoire de meurtres en série. Elle cache des secrets bien plus sombres, impliquant des notables de la ville dans un réseau pédophile sordide. Les « belles ronfleuses », ces jeunes filles droguées et abusées, sont le lien macabre entre le passé et le présent. En découvrant ce système de corruption et de perversion, Bramard comprend que l’affaire Automnal n’est que la partie émergée d’un iceberg de noirceur et de vice. Une révélation qui va le forcer à affronter non seulement le tueur, mais aussi toute une société gangrenée par le mal.
L’affaire Automnal est donc bien le cœur noir du roman, le point de convergence de tous les drames personnels et collectifs. À travers elle, Davide Longo explore avec une rare intensité les thèmes de la culpabilité, de la rédemption et de la quête de vérité. Bramard, en plongeant dans les méandres de cette enquête, va aussi plonger dans ses propres ténèbres intérieures, affronter ses démons et ses erreurs passées. Une introspection douloureuse mais nécessaire pour espérer trouver la paix et la justice.
Tel un fil d’Ariane dans le labyrinthe des âmes humaines, l’affaire Automnal guide le lecteur à travers les méandres d’une intrigue aussi complexe que passionnante. Une plongée vertigineuse dans les abîmes du mal, magistralement orchestrée par la plume incisive de Davide Longo. Une enquête qui restera longtemps en mémoire, bien après avoir refermé le livre.
Les thèmes majeurs abordés : beauté, innocence perdue, rédemption
Au-delà de l’intrigue policière haletante, « L’Affaire Bramard » de Davide Longo explore avec une rare profondeur plusieurs thèmes universels qui donnent au roman toute sa portée philosophique et émotionnelle. Parmi ces thèmes, trois se distinguent particulièrement : la beauté, l’innocence perdue et la rédemption. Des notions qui s’entremêlent tout au long du récit, formant une trame complexe et fascinante.
La beauté est sans doute le thème le plus inattendu et le plus dérangeant du roman. Tout au long de l’enquête, Bramard est confronté à des crimes d’une violence indicible, des actes de barbarie qui semblent défier toute notion d’humanité. Pourtant, au cœur même de cette noirceur, une forme de beauté subsiste, une grâce troublante qui fascine autant qu’elle répugne. Les descriptions des corps des victimes, avec ces entailles si précises et si délicates, évoquent presque des œuvres d’art macabres. Une esthétique du mal qui trouble profondément Bramard et le renvoie à ses propres contradictions, lui qui a choisi de consacrer sa vie à traquer les ténèbres de l’âme humaine.
Cette beauté perverse est intimement liée au thème de l’innocence perdue. Les victimes de l’affaire Automnal, comme celles des meurtres récents, sont toutes de jeunes femmes fauchées dans la fleur de l’âge, des êtres purs et insouciants dont la vie a été brutalement brisée. À travers elles, c’est toute l’idée d’une innocence originelle qui est mise à mal, l’illusion d’un monde où le mal n’aurait pas sa place. Les « belles ronfleuses », ces adolescentes droguées et abusées par des notables pervers, incarnent de manière glaçante cette perte d’innocence, cette corruption de la jeunesse par un système gangréné.
Face à ce constat amer, le thème de la rédemption apparaît comme un espoir fragile, une lueur dans les ténèbres. Tout au long du roman, Bramard est habité par cette quête obsessionnelle de justice, ce besoin viscéral de réparer les erreurs du passé. Résoudre l’affaire Automnal, c’est pour lui une manière d’expier ses propres fautes, de donner un sens aux tragédies qui ont brisé sa vie. Mais cette rédemption a un prix : elle exige de lui qu’il affronte ses démons intérieurs, qu’il explore les recoins les plus sombres de son âme. Un chemin de croix douloureux mais nécessaire pour espérer trouver la paix.
Ces trois thèmes – beauté, innocence perdue, rédemption – forment la colonne vertébrale du roman, le socle philosophique sur lequel Davide Longo bâtit son intrigue. Ils donnent à « L’Affaire Bramard » une profondeur et une intensité rares, bien au-delà du simple thriller psychologique. À travers le destin de ces personnages brisés, c’est toute la complexité de la nature humaine qui se dévoile, dans ce qu’elle a de plus sublime et de plus sombre à la fois.
Véritable plongée dans les abysses de l’âme, le roman de Davide Longo nous confronte à nos propres parts d’ombre, à ces questions existentielles qui hantent chacun d’entre nous. Une expérience de lecture intense et dérangeante, qui ne laisse pas indemne mais invite à une profonde réflexion sur le sens de nos vies et la part de lumière qui subsiste en nous, malgré tout.
À découvrir ou à relire
Le style d’écriture de Davide Longo : descriptions, dialogues, atmosphère
Au-delà de l’intrigue captivante et des personnages fascinants, c’est aussi par son style unique que « L’Affaire Bramard » se distingue. L’écriture de Davide Longo, à la fois ciselée et évocatrice, contribue grandement à l’atmosphère si particulière du roman, à cette tension permanente entre ombre et lumière qui fait toute sa force.
Les descriptions sont sans doute l’un des points forts de l’auteur italien. Avec une précision quasi chirurgicale, il dresse le portrait des lieux et des êtres qui peuplent son récit. Chaque détail semble soigneusement choisi pour créer une image saisissante, presque cinématographique. Des paysages urbains de Turin aux forêts denses qui entourent la ville, en passant par les scènes de crime où s’attarde son regard, tout prend vie sous sa plume avec une intensité rare. Mais ces descriptions ne sont jamais gratuites : elles participent pleinement à l’atmosphère du roman, créant un décor à la fois réaliste et mental, miroir des tourments intérieurs des personnages.
Les dialogues sont un autre élément clé du style de Davide Longo. Vifs, percutants, ils donnent au récit son rythme et sa tension. À travers les échanges entre Bramard, Arcadipane et Isa, c’est toute la complexité de leurs relations qui se dévoile, faite de non-dits, de fêlures et de compréhension mutuelle. Longo a le don de faire parler ses personnages avec une authenticité désarmante, comme s’il transcrivait des conversations réelles. Mais là encore, chaque mot est savamment pesé, chaque réplique vient enrichir notre compréhension des protagonistes et faire avancer l’intrigue.
Enfin, l’atmosphère si singulière du roman doit beaucoup à la maîtrise stylistique de son auteur. Tout au long du récit, Davide Longo instaure un climat de tension et de mystère qui ne se relâche jamais vraiment. Une impression diffuse de malaise, de danger latent, qui colle parfaitement à la noirceur des thèmes abordés. Mais cette atmosphère pesante est aussi contrebalancée par des moments de grâce, des instants suspendus où la beauté du monde se révèle furtivement. Un clair-obscur constant qui reflète les contradictions et la complexité de l’âme humaine.
Le style de Davide Longo est donc bien plus qu’un simple ornement : il est le cœur battant du roman, le souffle qui lui donne vie et profondeur. Par sa précision et son évocatrice, il nous plonge au cœur de l’enquête et de la psyché tourmentée des personnages. Une écriture subtile et puissante, qui sait suggérer plus que montrer, laissant au lecteur la liberté d’interpréter et de ressentir.
Véritable signature de l’auteur, ce style si particulier fait de « L’Affaire Bramard » bien plus qu’un simple thriller : une expérience littéraire intense et marquante, qui prouve, s’il en était besoin, que la littérature policière peut atteindre des sommets d’exigence et de finesse. Une leçon de maîtrise stylistique qui confirme le talent immense de Davide Longo et son statut d’écrivain majeur du polar européen.
Les racines du mal et la psychologie des personnages
« L’Affaire Bramard » n’est pas qu’une simple enquête policière : c’est aussi et surtout une plongée fascinante dans les méandres de la psyché humaine. À travers les personnages du roman, Davide Longo explore avec une rare acuité les racines du mal, ces pulsions sombres qui sommeillent en chacun de nous et peuvent parfois conduire aux actes les plus terribles.
Au cœur de cette réflexion se trouve bien sûr le personnage du tueur, cet être insaisissable qui hante les pages du livre comme il hante les pensées de Corso Bramard. Au fil de l’enquête, le commissaire va peu à peu cerner la personnalité de ce criminel hors norme, comprendre les motivations profondes qui le poussent à ces actes d’une barbarie inouïe. Mais cette compréhension n’est pas sans danger : en plongeant dans l’esprit du tueur, Bramard prend le risque de se confronter à ses propres démons, à cette part d’ombre qu’il porte en lui et qui fait écho, d’une certaine manière, à celle de son adversaire.
Car Bramard lui-même n’est pas exempt de cette fascination trouble pour le mal. Hanté par les fantômes de son passé, rongé par la culpabilité et le désespoir, il est un homme brisé qui a plus d’une fois contemplé l’abîme. Son obsession pour l’affaire Automnal, sa quête acharnée de la vérité, sont autant une manière de traquer le tueur que de fuir ses propres tourments. En cela, il incarne parfaitement cette idée que la frontière entre le bien et le mal est parfois plus ténue qu’on ne le croit, que chacun porte en soi la potentialité du crime.
Mais le mal, dans « L’Affaire Bramard », n’est pas qu’une affaire individuelle. Il est aussi le fruit d’une société gangrenée, où la corruption et la perversion se dissimulent sous le vernis des apparences. L’affaire des « belles ronfleuses », ce réseau pédophile impliquant des notables de la ville, en est le symbole glaçant. À travers elle, Davide Longo met en lumière les racines profondes du mal, celles qui plongent dans les soubassements d’un système où l’argent et le pouvoir permettent tous les abus. Une réalité sordide qui vient percuter de plein fouet l’idéalisme et l’intégrité de personnages comme Bramard ou Arcadipane.
Pourtant, malgré cette noirceur omniprésente, le roman laisse filtrer quelques lueurs d’espoir. Car si les personnages de Davide Longo sont tous habités par leurs démons, ils n’en restent pas moins profondément humains, animés par des sentiments authentiques et des valeurs fortes. L’amitié indéfectible entre Bramard et Arcadipane, la quête de justice d’Isa Mancini, sont autant de contrepoints lumineux à l’obscurité ambiante. Une humanité cabossée mais résistante, qui refuse de se laisser engloutir par le mal.
Véritable voyage au bout de la nuit, « L’Affaire Bramard » nous confronte sans détour à la part la plus sombre de l’homme. Mais il le fait avec une finesse psychologique et une profondeur philosophique rares, qui transforment le roman noir en une méditation puissante sur la condition humaine. Une œuvre qui nous renvoie à nos propres abîmes intérieurs, à ces questions existentielles qui hantent chacun d’entre nous, pour mieux nous inviter à tracer notre propre chemin vers la lumière.
À découvrir ou à relire
Les lieux comme reflets de l’état d’esprit des protagonistes
Dans « L’Affaire Bramard », les lieux ne sont pas de simples décors : ils sont de véritables acteurs du récit, des miroirs qui reflètent et influencent l’état d’esprit des personnages. Davide Longo utilise avec maestria cette géographie symbolique pour donner à son intrigue une profondeur et une résonance particulières.
Turin, la ville où se déroule l’essentiel de l’action, est bien plus qu’un simple arrière-plan urbain. Par son architecture austère, ses rues sombres et ses places imposantes, elle incarne parfaitement la noirceur et la complexité de l’enquête. Les descriptions minutieuses de Longo donnent à la cité une présence presque palpable, une atmosphère oppressante qui semble peser sur les épaules de Bramard et de son équipe. Turin devient ainsi le reflet de leur quête labyrinthique, de cette plongée dans les ténèbres de l’âme humaine qui est au cœur du roman.
Mais c’est peut-être dans les lieux plus intimes, plus personnels, que ce lien entre espace et psychisme est le plus frappant. L’appartement de Bramard, par exemple, est à l’image de son occupant : sobre, presque monacal, dépouillé de tout superflu. Un refuge ascétique où le commissaire vient panser ses plaies, affronter ses démons loin du tumulte du monde extérieur. De même, la maison familiale d’Arcadipane, avec son jardin soigneusement entretenu et sa décoration chaleureuse, reflète la stabilité et la droiture de ce personnage, son rôle de roc et de soutien moral dans l’équipe.
Les scènes de crime elles-mêmes, ces cabanons isolés où les victimes ont été suppliciées, sont autant de projections monstrueuses de l’esprit du tueur. Leur isolement, leur dépouillement, l’horreur clinique des tortures qui y ont été perpétrées, tout cela nous plonge dans la psyché déviante de l’assassin, dans cet univers de perversion froide et méthodique. Des lieux qui marquent aussi profondément Bramard, comme si, en les arpentant, il s’imprégnait un peu de cette folie destructrice.
Enfin, les rares moments de paix et de beauté du roman trouvent eux aussi leur écho dans des lieux spécifiques. Les scènes où Bramard se réfugie dans la nature, contemplant la majesté des Alpes ou la sérénité d’un lac de montagne, offrent une respiration salvatrice, une échappée lumineuse dans les tourments de l’enquête. Comme si, l’espace d’un instant, la pureté de ces paysages permettait au commissaire de renouer avec une forme d’harmonie intérieure, de trouver la force de poursuivre sa quête.
Cette géographie intime, savamment entrelacée avec la trame narrative, donne à « L’Affaire Bramard » une dimension presque onirique. Les lieux deviennent les réceptacles des états d’âme des personnages, les décors mouvants d’un théâtre intérieur où se jouent les drames les plus sombres et les espoirs les plus ténus. Une spatialisation des émotions qui contribue grandement à la puissance évocatrice du roman.
Par ce jeu subtil d’échos et de correspondances entre les lieux et les âmes, Davide Longo nous offre bien plus qu’un simple cadre à son intrigue. Il façonne un univers romanesque d’une rare densité, où chaque détail, chaque description, entre en résonance profonde avec les tourments et les désirs des protagonistes. Une géographie symbolique qui est la marque des plus grands, et qui confirme, s’il en était besoin, le talent immense de cet écrivain hors norme.
Réflexions sur la justice, la vengeance et les zones grises
Au cœur de « L’Affaire Bramard » se trouve une réflexion profonde et nuancée sur la justice, ses limites et ses zones d’ombre. Tout au long du roman, Davide Longo interroge avec acuité notre rapport à la loi, à la morale, à cette frontière parfois ténue entre le bien et le mal. Une réflexion qui trouve son incarnation la plus troublante dans le personnage de Corso Bramard, ce commissaire tourmenté qui ne cesse d’osciller entre son désir de justice et sa soif de vengeance.
Car pour Bramard, l’affaire Automnal n’est pas qu’une simple enquête : c’est une blessure intime, un traumatisme qui a brisé sa vie et celle de ses proches. En traquant le tueur, c’est aussi ses propres démons qu’il pourchasse, dans une quête obsessionnelle de réparation et de châtiment. Mais cette soif de vengeance, si humaine et compréhensible soit-elle, n’est-elle pas aussi une forme de justice sauvage, une négation des principes mêmes qu’il est censé défendre ? C’est tout le dilemme moral qui se pose à Bramard, et à travers lui, au lecteur.
Davide Longo explore avec une subtilité remarquable ces zones grises où la loi des hommes ne suffit plus à contenir la noirceur de l’âme. L’affaire des « belles ronfleuses », ce réseau pédophile protégé par des notables corrompus, en est l’exemple le plus criant. Face à l’horreur indicible de ces crimes, face à l’impuissance d’une justice qui peine à condamner les coupables, la tentation de se faire justicier devient presque irrésistible. Comme si, face à certains abîmes de perversité, seule une vengeance implacable pouvait restaurer un semblant d’équilibre moral.
Mais le roman ne cède jamais à la facilité d’un manichéisme simpliste. Bramard, malgré sa rage et son désespoir, n’est pas un vengeur solitaire et tout-puissant. Il est un homme blessé, habité par le doute et la culpabilité, qui doit composer avec les exigences de sa fonction et de sa propre intégrité. Son cheminement tout au long du récit est celui d’une conscience en lutte avec elle-même, qui cherche à tracer son propre chemin entre la lettre froide de la loi et le cri brûlant de la vengeance.
C’est peut-être là la grande force de « L’Affaire Bramard » : nous plonger, par l’intensité de son écriture et la profondeur de ses personnages, au cœur de ces dilemmes moraux qui sont le propre de la condition humaine. En explorant sans concession les zones les plus sombres de l’âme, en mettant en scène ces destins cabossés qui cherchent leur voie dans un monde ambigu, Davide Longo nous renvoie à nos propres contradictions, à cette part d’ombre que chacun porte en soi.
Bien plus qu’un simple polar, « L’Affaire Bramard » est une méditation puissante et dérangeante sur la justice et ses limites, sur la frontière fragile entre le châtiment légitime et la vengeance aveugle. Une réflexion qui ne nous apporte pas de réponses toutes faites, mais nous invite à affronter la complexité du réel, à assumer nos propres zones grises. Et c’est justement dans cette ambiguïté assumée, dans ce refus des certitudes faciles, que réside toute la force subversive et libératrice de la grande littérature.
À découvrir ou à relire
L’humanité de Corso Bramard malgré sa part d’ombre
S’il est un personnage qui incarne à lui seul toute la complexité et la puissance de « L’Affaire Bramard », c’est bien Corso Bramard lui-même. Protagoniste tourmenté et fascinant, il est le cœur vibrant du roman, celui par qui nous arrivent les émotions les plus intenses et les questionnements les plus profonds. Mais au-delà de son rôle central dans l’intrigue, Corso Bramard est avant tout un être d’une humanité bouleversante, un homme qui ne cesse de lutter contre ses propres démons pour tenter de rester fidèle à ses valeurs.
Car Bramard n’est pas un héros sans peur et sans reproche. C’est un être blessé, rongé par la culpabilité et le désespoir depuis la tragédie qui a brisé sa vie vingt ans plus tôt. La mort brutale de sa femme et de sa fille, tuées par le mystérieux assassin qu’il traquait, a laissé en lui une plaie béante, un gouffre de souffrance qui menace à tout instant de l’engloutir. Cette part d’ombre, il la porte en lui comme une croix, un fardeau qui pèse sur chacun de ses actes et chacune de ses pensées.
Pourtant, malgré cette noirceur qui l’habite, Bramard n’a jamais cessé d’être profondément humain. Sa quête acharnée de justice, sa volonté inflexible de faire triompher la vérité, sont autant de lumières qui viennent percer les ténèbres de son âme. Même dans ses moments les plus sombres, quand la tentation de la vengeance le submerge, il reste habité par une forme de droiture, une intégrité morale qui le rattache à l’humanité.
C’est peut-être dans ses relations avec les autres que cette humanité de Bramard se révèle le plus intensément. Son amitié indéfectible avec Arcadipane, faite de respect mutuel et de loyauté sans faille, est un des piliers du roman. Face à ce compagnon de route fidèle et intègre, Bramard peut laisser transparaître ses fêlures, ses doutes, sans craindre le jugement ou la pitié. Une relation d’une rare intensité, qui vient illuminer les recoins les plus sombres de son être.
Même avec Isa Mancini, cette jeune recrue impétueuse et rebelle, Bramard noue un lien d’une grande force. Malgré leurs différences, leurs conflits, il reconnaît en elle une soif de justice qui fait écho à la sienne. Et s’il se montre parfois dur, exigeant avec elle, c’est aussi par une forme d’affection bourrue, un désir de la protéger des abjections du monde. Une relation presque paternelle, qui révèle chez cet homme brisé une capacité intacte à l’empathie et à la bienveillance.
C’est toute la force du personnage de Corso Bramard, et tout le talent de Davide Longo : nous faire aimer et comprendre un être qui pourrait sembler inaccessible, perdu dans les limbes de sa propre noirceur. Par la justesse de son écriture, par la finesse de sa plume, l’auteur italien nous rend cette humanité palpable, vibrante d’authenticité. Bramard n’est pas un surhomme, mais un être de chair et de sang, avec ses contradictions et ses blessures.
À travers ce portrait d’une humanité cabossée mais résistante, Davide Longo signe bien plus qu’une grande figure de polar. Il nous offre un miroir saisissant de notre propre condition, de ces parts d’ombre et de lumière qui coexistent en chacun de nous. Et c’est en nous plongeant dans les tourments de Corso Bramard qu’il nous invite, in fine, à regarder en face notre propre complexité, à embrasser la totalité de notre être avec lucidité et compassion. Un merveilleux message d’espoir, qui nous rappelle que même au cœur des ténèbres les plus profondes, l’humanité reste la plus belle et la plus puissante des lumières.
Extrait Première Page du livre
» 1.
La porte entrouverte du cabanon. Son corps étendu sous la lumière diaphane de l’après-midi. Le dessin des entailles sur son dos nu. Des cheveux noirs éparpillés tout autour.
Faire quelques pas incertains en s’efforçant de ne pas y croire, puis tomber à genoux et rester là, les mains vaines le long du corps, sans cesser de regarder, tel Hector n’abaissant pas le regard devant Achille qui s’apprêtait à lui ôter la vie.
2.
Quand le réveil sonna, Corso était allongé dans son duvet, les mains derrière la tête, observant son haleine qui se condensait dans l’air froid et s’élevait, pour disparaître dans l’obscurité.
Une heure plus tôt, ou peut-être deux, le cri d’un animal au loin l’avait tiré du sommeil et, une fois réveillé, il l’avait écouté, immobile, l’imaginant à l’agonie ou mettant bas, jusqu’à ce que ce cri s’éteigne, laissant place au halètement du vent.
Corso fit taire le réveil d’un geste précis de la main, il alluma sa torche et consulta la Cyma qu’il portait au poignet. Elle indiquait 1 h 57. Le vent s’était calmé et à l’extérieur de la tente ne montait plus qu’un silence de bruits infimes.
Il baissa les yeux sur le livre laissé ouvert la veille près de sa gourde, ses pages tournées vers le bas, un peu de travers, comme les ailes d’un oiseau condamné à voler en cercle.
Dans les dernières lignes, la femme racontait à son mari, de retour d’un long voyage, que pendant son absence, leur enfant était restée sage et docile mais qu’elle n’avait presque rien mangé et qu’elle s’était mise à dire, quoi qu’on lui propose, « n’y pense même pas ». Assis dans le canapé, l’homme l’écoutait, puis il ôtait ses chaussures et répondait quelque chose qui laissait le problème entier.
Corso se massa la nuque. Deux gouttes de condensation couraient sur la toile, insectes à la carapace translucide. Puis il sortit son pantalon et ses chaussettes du fond de son duvet, rangea son barda dans son sac à dos et sortit.
Dehors, le clair de lune revêtait tout d’un même gris. «
- Titre : L’Affaire Bramard
- Titre original : Il caso Bramard
- Auteur : Davide Longo
- Éditeur : Éditions du Masque JC Lattès
- Nationalité : Italie
- Date de sortie : 2024
Je m’appelle Manuel et je suis passionné par les polars depuis plus de 60 ans, une passion qui ne montre aucun signe d’essoufflement.
Très intéressant ce livre votre analyse l’histoire ou ce mêle la psychologie j’aime cette phrase les racines du mal , la première page me donne envi de lire ce livre ( le cri d’un animal dans la nuit ) frissons qui pousse a découvrir ce cri .
La pédophilie chez les hauts de la société sont parfois les plus pervers les bons hommes en cols blancs ou l’on a peur d’enquêter Politiques Notables le vice et parfois la ou ou l’attend le moins .
Je vais découvrir Davide Longo Merci a vous Manuel .
« L’Affaire Bramard » de Davide Longo est un polar d’une rare intensité, qui nous entraîne dans les méandres d’une enquête complexe et de l’âme humaine. À travers le personnage fascinant de Corso Bramard, l’auteur explore avec maestria les zones grises de la morale et la quête de rédemption. Un roman puissant et captivant, qui ne vous lâchera pas !